Une forêt d'arbres creux d'Antoine Choplin nous emmène dans la ville ghetto de Terezin située dans la région des Sudettes alors annexées par l'Allemagne nazie. Nous y suivons plus particulièrement l'artiste caricaturiste Bédrich Fritta.
A son arrivée, en décembre 41, il est affecté avec d'autres artistes ou architectes au bureau d'études. A longueur de journée, ils doivent faire des plans de construction ou d'aménagement de bâtiments dont un crématorium. Mais la nuit, ils se retrouvent pour dessiner chacun à sa manière la réalité du camp ; les dessins sont cachés derrière des lattes de bois et ils arriveront même à en faire sortir du camp. Mais un matin, la cachette a été découverte : il est arrêté ainsi que ses compagnons, interrogé par la gestapo, emprisonné et déporté à Auschwitz où il mourra en novembre 44.
Le livre évoque largement la vie culturelle de Térezine où été détenus de nombreux artistes. Il y avait la partie officielle qui permettait d'assister à des conférences, d'entendre des concerts auxquels se trouvaient même parfois des dignitaires nazis. Il y avait aussi la vie culturelle cachée, constituée en grande partie par les dessins réalisés la nuit ; plusieurs chapitres du livre sont des descriptions de certaines des oeuvres de Bédrich qui nous sont parvenues. Elles nous montrent l'horreur du camp avec ses corps amaigris, ses visages torturés, les arrestations et la mort qui rôde partout.
Les arbres constituent l'autre part importante du livre. Celui-ci s'ouvre sur les deux ormes de la place de Terezin et se termine sur "l'assemblée des arbres" que l'on devine au loin. Pour Bédrich, "les forêts portent les espoirs" car "on n'a jamais rapporté le cas d'une forêt d'arbres creux". Entre le début et la fin, on ne retrouve les arbres que lors de l'évocation heureuse des promenades que Bédrich peut faire de temps en temps avec sa femme et son fils. Ils vont alors en bordure du camp pour regarder la nature environnante entre les arbres et, tout au loin, une petite maison où ils imaginent une vie paisible. Le reste du temps, ils sont cruellement absents car c'est la foule écrasante, toujours plus nombreuses dans les rues et les baraquements, qui domine et on ne voit que les murs nus et laids.
Comme les fois précédentes, Choplin nous livre un récit court mais dense dans tout ce qu'il nous transmet. En outre, le ton de Choplin, toujours un peu détaché, permet d'atténuer l'horreur que vivent ses personnages, mais longtemps les dessins de Bédrich resteront dans notre mémoire.
Lu dans le cadre des Matchs de la rentrée littéraire par ma maman. Un grand merci à Léa de Priceminister, à Priceminister et aux éditions de la Fosse aux ours.
#MRL15 #PriceMinister.
Résumé :
TEREZIN, RÉPUBLIQUE TCHÈQUE, décembre 1941. Bedrich arrive dans la ville-ghetto avec femme et enfant. Il intègre le bureau des dessins. Il faut essayer de trouver chaque matin un peu de satisfaction en attrapant un crayon, jouir de la lumière sur sa table à dessin, pour enfin s'échapper du dortoir étouffant, oublier la faim, la fatigue et l'angoisse. Chaque jour se succèdent commandes obligatoires, plans, aménagements de bâtiments. Chaque nuit, le groupe se retrouve, crayon en main, mais en cachette cette fois. Il s'agit de représenter la réalité de Terezin sans consigne d'aucune sorte. Et alors surgissent sur les feuilles visages hallucinés, caricatures. Tout est capté et mémorisé la nuit puis dissimulé précieusement derrière cette latte de bois du bureau des dessins.